• L'enfant bleu (7/10)

    Grossis , mon garçon grossis !

    Quand il revint à la maison , après un mois de traitement post-opératoire , nous vîmes tout de suite que Nick allait mieux . il avait une nouvelle et grande cicatrice sous l'aisselle , barrée de points qui faisaient comme des traverses de chemin de fer ; elle nous inquiétait moins toutefois que la plaie de sa cheville , tout juste fermée , encore vilaine et boursouflée .

    Mais , petit miracle , il dormait beaucoup mieux , parfois jusqu'à six heures d'affiliée . Il mangeait plus et vomissait moins souvent ; il riait davantage et agrippait avec plus de force la main ou le jouet qu'on lui tendait .

    Son apparence aussi avait changé . Ce n'était pas spectaculaire (il était encore noiraud , chétif), mais les taches de ses tempes s'étaient atténuées , ses lèvres étaient moins bleues, ses ongles plus roses . Les examens pratiqués dans les semaines qui suivirent confirmèrent que le sang qui irriguait son organisme était plus riche en oxygène , que le rythme cardiaque était plus régulier .

    On pouvait donc espérer rétablir un jour une circulation virtuellement normale par une opération consistant à insérer dans le coeur une membrane synthétique que Nick garderait en principe toute sa vie . Une telle intervention ne pouvait avoir lieu avant qu'il ne pèse 15 à 20 kg , c'est-à-dire lorsque son coeur serait presque aussi gros que celui d'un adulte et que la nature pourrait pallier la différence : la membrane artificielle <<prêterait>>un peu et le coeur lui-même fabriquerait des tissus pour combler les vides éventuels .

    Nous nous mîmes donc en devoir de faire grossir notre fils. Durant le premier mois , nous l'avons pesé quotidiennement puis , après avoir constaté qu'il avait pris au plus 80 à 90 grammes , nous nous fîmes à l'idée qu'il faudrait encore beaucoup de temps .

    Mais il y avait d'autres symptômes d'amélioration : quand il eut un an environ , Nick fut capable de se tenir droit , en vacillant , quand on l'asseyait . Il manifesta , pour la première fois , le désir de quitter le petit fauteuil qui avait été tout son univers jusque -là . Et il contemplait ses nouveaux horizons d'un oeil vif et pénétrant .

    Mais surtout , il commença à parler , bien que ce ne fût guère qu'un murmure .Un mois ou deux après son retour , alors que j'étais aller chercher Claire qui avait conduit sa voiture chez le concessionnaire pour une révision et m'attendait dans le hall d'exposition avec Nick , celui-ci m'aperçut le premier . Probablement surpris de me voir en ce lieu étrange pour lui et au milieu de la journée , il cria <<papa ! papa !>> en essayant  de se précipiter vers moi. Le représentant et les clients qui se trouvaient là ont dû se poser des questions sur notre état mental en nous voyant nous embrasser tous les trois comme des fous . Notre fils avait prononcé son premier mot à haute voix ! Il parlait vraiment.

    Il a persévéré sans jamais revenir en arrière et , disposant dès lors d'un moyen de communiquer , il élargit très rapidement son vocabulaire .

    Pour Claire et moi , il y avait bien plus que le plaisir d'écouter le bavardage de cet enfant qui avait été si longtemps silencieux . C'était la preuve qu'il y avait une intelligence normale , et la fin des craintes que nous entretenions presque depuis sa naissance .Bien sûr , les cardiologues nous avaient affirmé que la maladie entraînerait pas de déficience mentale , nous expliquant que le cerveau était le plus avide des organes et qu'il s'arrangeait toujours pour avoir toute sa part d'oxygène et de glucose , quitte à en priver le reste de l'organisme . mais nous n'avions jamais été tout à fait convaincus .Maintenant , en écoutant Nick jacasser sans arrêt , en voyant sa curiosité s'éveiller , nous étions enfin rassurés : ce n'était pas un enfant attardé.

    A un an , il pesait 4 kg et se tint debout , appuyé sur la table basse , pour souffler la bougie de son premier anniversaire . Ce même jour , nous le mîmes aux aliments solides . Dans les trois mois qui suivirent , il apprit à s'asseoir tout seul. Si on l'aidait un peu , il réussissait même à se mettre debout et à tenir sur ses pieds pendant assez longtemps , s'il pouvait s'appu


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