• La triple greffe de Didier

    Après une énorme fatigue, et une soif démesurée qui me fait boire jusqu'à douze litres par jour, c’est le coma et la découverte brutale du diabète. J’ai 13 ans, nous sommes en 1971 !

    A partir de ce moment, c’est une autre vie qui démarre, organisée par les piqûres journalières, les analyses d’urines trois fois par jour, mais aussi les fatigues, les étourdissements et les malaises qui eux, arrivent soudainement et très (trop) fréquemment. A l’adolescence, le regard des autres de mon âge est pesant et sans pitié. Le diabète est une maladie qui ne se voit pas et que l’on arrive à cacher le plus souvent possible. Je ne l’explique pas à mes copains d’une quinzaine d’années de peur de rester de côté, mais à certains moments, se soustraire à la vigilance des regards n’est plus possible et ils découvrent mon état et s’en moquent.

    Le moindre fait inattendu peu entraîner un malaise, une perte de connaissance sans que l’on s’y attende. A l’école, au travail entre amis, n’importe où, le malaise arrive en quelques secondes sans que rien ne le laisse prévoir, et c’est l’étourdissement, le coup de chaud, le corps en sueur. C’est la rapidité du changement qui effraie le plus.

    Le diabète affecte également l’intérieur, l’invisible. Les canaux sanguins se bouchent petit à petit en commençant par les plus fins, dans les yeux et les reins en particulier. Un matin c’est la cécité quasi complète d’un œil qui m’alerte. Toutes les alertes qui m’été formulées et expliquées deviennent réalité et dès ce jour je les prends véritablement en compte. Jusqu’ici, je les écoutais avec légèreté. Si la vue est revenue avec l’aide de séances de laser, c’est bientôt au tour des reins d’être atteints.

     

    Même quand on s’y attend, la dialyse est un moment pénible, elle détruit tout. Le moral pour commencer où l’on devient entièrement dépendant d’une machine trois fois par semaine, sans jours férié possible. Mais c’est surtout la vie sociale qui n’existe plus : le travail devient quasi impossible, dans le meilleur cas très perturbé et à quarante ans, on se retrouve vite seul à ressassé la maladie.

     

    Comme il faut vite oublier ce moment, c’est la greffe, seule possibilité de « guérison » qui réclame mon attention jour et nuit. La décision de la greffe est difficile à prendre. Quelle est la valeur de ma vie pour pouvoir prétendre accueillir l’organe d’un donneur forcement inconnu ? Il existe obligatoirement une personne qui a un besoin plus urgent de ce greffon tant attendu que moi. Pourquoi en profiterais-je à la place d’un autre ? Les proches ne peuvent pas aider à cette décision. Voilà une partie des questions qui se bousculent, mais aussi quelle greffe simple pour le rein ou double avec le pancréas qui supprime le diabète d’un coup. D’un côté une intervention connue puisque 2500 sont effectuées chaque année en France contre une vingtaine pour la greffe double qui me convient. Je parviens à obtenir (difficilement) les renseignements que je cherche et opte pour la double transplantation.

     

    L’intervention se déroule parfaitement bien, et c’est le retour à la vie, une vie retrouvée, belle et différente malgré tout. Une vie sans régime, sans piqûre, sans malaise physique toujours, parce que pour ce qui est du moral c’est différent quand je pense et repense en permanence à cet inconnu qui m’a fait le plus beau des cadeaux, le cadeau de la vie à travers ces organes qu’il m’a donné.

     

     

    (extrait du livre témoignage de Didier Simon " Une vie pour deux " .Pour obtenir ce livre , prendre contact

     

    didier.simon@aliceadsl.fr

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