• La machine à marcher du Pr Rabischong (2/6)

    Un mois après ses premiers pas , Marie-Pierre va apprendre à tourner.

    Tout est prêt .Dans le fond de la pièce , la machine , une centrale hydraulique de 1,80 m sur 1,20 m est branchée .  Emmanuel Rabischong , fils du professeur et kinésithérapeute , a revétu lui aussi une combinaison bleue sur laquelles sont fixés , aux articulations des hanches et des genoux , quatre potentiomètres . Le mini-ordinateur glissé dans sa ceinture le relie directement à Marie-Pierre . Ils sont placés côte à côte, comme au départ d'une course.

     - Prête ? lui demande t-il .

    - O.K .! répond Marie-Pierre , quin s'appuie bien fort sur ses deux cannes pour ne pas perdre l'équilibre et basculer en avant.

    A côté d'elle , deux autres kinésithérapeutes sont près à intervenir pour la rattraper . Les membres de l'équipes du Pr Rabischong et les médecins étrangers venus visiter ce centre pilote ouvert depuis trois mois retiennent leur souffle .

    Emmanuel souléve sa jambe droite , la déplie lentement et la pose en avant . Marie-Pierre tremble sur ses bras et suit . Je n'ai jamais accompli aussi parfaitement un mouvement de gymnastique , pense t-elle . Je doit m'appliquer , ils me regarde tous .

    Son genou droit se replie et sa jambe , mue par le moteur fixé sur sa jambe droite , se propulse en avant . Les yeux fixés au sol , le visage concentré , elle avance demi-pas par demi-pas . Sa progression est lente , car associée à sa paralysie , l'anesthésie de ses membres inférieurs la prive de toute information quant à la position de ses jambes dans l'espace et quant au contact de ses pieds avec le sol.

    Quand elle arrive au fond de la salle , le Pr Rabischong se précipite vers elle pour la féliciter .

    <<je n'ai jamais eu aussi chaud ! >> s'exclame Marie-Pierre , sous l'oeil ravi de toute l'équipe , pour qui ces quinze pas sont la consécration de six années de recherche .

    <<En décomposant les mouvements successifs de la marche , nous nous sommes rapidement aperçus que nous avions affaire à un geste semi-automatique , commente le Pr Rabischong . Quand vous vous promenez dans la rue , vous ne vous posez pas de questions pour savoir quels muscles vous propulsent en avant . Vous déclenchez la "séquence de marche" et vous vous contentez de la piloter pour la direction et la vitesse . Vous n'intervenez pas activement dans la mécanique du système . Ce constat d'automatisme de la marche est  le point de départ de nos recherches .>> Depuis la première marche de Marie-Pierre , en octobre 1982, douze paraplégiques ont utilisé avec succès la machine du professeur . 

    La Cinquantaine active , Pierre Rabischong , qui court sans cesse entre sa chaire de professeur à la faculté de médecine , son unité de recherches biomécaniques et le centre clinique de Propara , est l'homme d'une passion ; la robotique appliquée à la médecine . A partir de ses études sur les articulations et la préhension des objets par les membres supérieurs , il en vient dans les années 60 , à comparer les robots et les hommes . A l'époque , les grandes industries qui fabriquent des marchandises à la chaîne commencent à utiliser des manipulateurs programmables , capables de remplacer les hommes pour les tâches répétitives et dangereuses. Calqués sur le modèle humain , ces manipulateurs sont loin d'être aussi performant que des membres . Mais ils ont à résoudre les mêmes problèmes que le bras et la main qui saisissent les objets .


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